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armatures bronzées


brutus
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La fouille du château de "La Madeleine", à Chevreuse (78), a été menée par P.J. Trombetta (celui qui a aussi mené à bien les fouilles emblématiques du grand Louvres) et B. Dufaÿ, fin des années 1980 et début 1990. Il manquait une publication d'envergure afin de faire connaître les résultats de cette fouille. Le service archéologique du département des Yvelines prépare cette publication tant attendue.

Un collègue et ami, Nicolas Giraud, a été chargé d'étudier le mobilier métallique (1117 objets). Parmi ce mobilier, un stock de carreaux d'arbalète (68 en tout) retrouvés dans les douves (si ma mémoire est bonne). Les résultats seront publiés dans un futur article... et ils sont très attendus, car 47 de ces armatures de projectiles portaient des traces d'alliage cuivreux sur et dans les douilles. Si cela semblait être (un peu) connu de l'autre côté de la Manche, c'est la première fois que cela a été observé chez nous. Problème de conservation des vestiges ou rareté de ces objets ? Aucun document médiéval ne semble évoquer cette pratique.

Reste ces questions : Pourquoi faire ça ? comment ?

Pour le "pourquoi", des hypothèses plus ou moins valables viennent à l'esprit : aspect esthétique ; permettre au collage du fer sur la hampe en bois de durer dans le temps en empêchant la formation de rouille ; performances balistiques (très douteux) ; "signature" d'une manufacture, d'un artisan ; marqueur social ; repérer plus aisément certains types de carreaux spéciaux (par leur poids, qualité, fonction) dans la trousse ; etc...

Pour le comment, JMC a tenté l'expérience ce week-end. Voici les résultat du premier essai. Il reste à déterminer un protocole d'expérimentation précis pour les essais suivants.

La raison de ce post est de vous solliciter : avez-vous vu ou possédé des carreaux sur lesquels sont visibles de légères traces de métal cuivreux ? Aussi, toutes vos idées concernant le pourquoi et le comment, si je puis dire..., sont les bienvenues.

Photo 1 : le carreau traité. Il a été en partie décalaminé.

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Edited by brutus
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Photo 2 : le bronze utilisé est le produit de la récupération d'objets industriels contemporains (roulements). Il faudrait pouvoir reproduire l'expérience avec un bronze à la composition proche du métal de l'époque. D'où cette première question : les bronzes anciens et modernes sont-ils sensiblement différents (ajout d'autres métaux), ou pas ?

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Photo 3 : La pointe a été plongée non chauffée dans le bronze en fusion. Elle a immédiatement chauffée à l'orange. La douille à été plongée chauffée au rouge. Elle est restée moins d'une poignée de secondes, sortie, puis replongée et ressortie.

Remarques : il faudrait essayer sur une armature non décalaminée. Essayer aussi en utilisant du Borax (ou autre moyen connu à l'époque, que je ne connais pas... et vous ?). Il faudrait essayer aussi plusieurs durées précises de "bains", sur du métal froid ou préalablement chauffé.

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Le cuivre étant moins dur que le fer, cela aurait il un but décoratif? Car je trouve que la douille est très belle. je sais c'est contre productif mais ces critères là pouvait peut être ne pas s'appliquer dans un contexte d'objet d'apparat ou de luxe (cf les pistolet mitrailleur des gardes raprochés de certains émir qui sont plaqués or).

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Des traces de cuivreux pourraient à mon sens avoir 2 origines : un cuivrage superficiel pour éviter la corrosion, dans l'esprit de votre essai ou une brasure de la douille. La répartition des traces de cuivreux devrait permettre de se faire une idée plus précise.

J'ai du mal à imaginer le premier usage, la rouille d'un enferron n'a pas que des inconvénients, on savait bien à l'époque que ça pouvait envenimer les plaies, même si on ne savait pas pourquoi. Par ailleurs avant qu'une pointe en acier soit bouffée par la corrosion l'arbalétrier aurait largement eu le temps de commencer à bouffer les pissenlits par la racine.

Ce traitement parait cher, compliqué et d'une utilité douteuse.

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L'aspect esthétique est la première chose à laquelle on pense. mais dans ce cas pourquoi ne dorer que la douille ?

Les carreaux étaient commandés en grande quantité dans les places fortes, et pouvaient rester stockés des dizaines d'années, faute d'utilisation (siège). Il fallait qu'ils soient encore en état d'être utilisés un très long moment après leur fabrication. Les sièges n'étaient pas courants et les conditions de conservation pas optimums dans ces châteaux humides. Ceux-ci, dans leur contexte archéologique, pourraient correspondre à un rejet, un débarras, au moment où le château perd sa vocation défensive : on comble les fossés et on jette les vieux trucs qui deviennent inutiles, trop vieux ou abimés. Cela reste néanmoins à confirmer par Nicolas.

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L'aspect esthétique est la première chose à laquelle on pense. mais dans ce cas pourquoi ne dorer que la douille ?

Les carreaux étaient commandés en grande quantité dans les places fortes, et pouvaient rester stockés des dizaines d'années, faute d'utilisation (siège). Il fallait qu'ils soient encore en état d'être utilisés un très long moment après leur fabrication. Les sièges n'étaient pas courants et les conditions de conservation pas optimums dans ces châteaux humides. Ceux-ci, dans leur contexte archéologique, pourraient correspondre à un rejet, un débarras, au moment où le château perd sa vocation défensive : on comble les fossés et on jette les vieux trucs qui deviennent inutiles, trop vieux ou abimés. Cela reste néanmoins à confirmer par Nicolas.

Si cela a un but de conservation, alors comment se comportent les alliages cuivreux en milieu humide? Ils me semble qu'ils se dégradent moins mais j'avoue que les métaux ça na jamais été mon fort...

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Bonjour à tous,

je suis Nicolas Girault (pas D, Fabrice), je fais parti de l'équipe qui a étudié cette collection. Mes deux autres camarades sont Sylvia Païn du service archéologique des Yvelines, restauratrice, et Aurore Doridot, doctorante à l'université de Paris 1, spécialiste des objets à base cuivre au Moyen Age qui a gérer en grande partie la dimension analytique en laboratoire.

Pour corriger et donner quelques détails : Ces fers de trait, dont quelques pointes de flèches, ont été trouvées essentiellement en position secondaire (pas là où on les attend) dans la base d'une tour associés à du matériel du XVeme siècle (et pas dans les douves, qui au passage n'ont jamais été fouillées) et dans un niveau remanié et réoccupé au XVIeme siècle par les troupes de la Ligue. Ils étaient tellement corrodés que ces carreaux ne présentaient aucune trace d'alliage à base de cuivre (bronze et laiton) au moment de leur découverte. Pour répondre à la question sur la corrosion, bien que le fer "parte" en premier, l'alliage cuivreux fini aussi par se corroder quand le fer est totalement minéralisé. Dans certains cas, des vestiges métalliques ont été découverts sous les produits de corrosions du fer qui ont migré en surface des carreaux. La plupart du temps, avant restauration, c'est la présence très discrète de produits de corrosions verdâtres qui a permis de détecter ce plaquage. Souvent, il ne reste plus du tout de métal conservé, on ne retrouve que ces produits verts intriqués dans la corrosion du fer. Il a donc était difficile d'identifier l'emprise exacte des plaquages sur les carreaux. Aucun exemplaire ne présente de trace de plaquage sur la pointe, cela ne veut pas dire que cela n'a pas été pratiqué. Les traces les plus proches de l'extrémité se situent au démarrage de la pointe après l'inflexion. On n'a réussi à caractériser ce plaquage uniquement en réalisant des coupes dans deux échantillons. Avec ces derniers, on a fait une cartographie des éléments chimiques grâce à un microscope électronique à balayage couplé à un EDS (permet la mesure quantitative des éléments chimiques). Ce fut long, mais on a réussi a montré que le métal devait se répartir au moins sur la totalité de la surface de la douille (intérieur et extérieur) et jusqu'à la base de la pointe. On ne préfère pas utiliser le terme de bronzage pour désigner cette pratique, le bronzage étant plutôt un traitement electro-chimique alors que là c'est clairement (même si je n'ai pas détaillé) thermo-chimique. Dernière remarque, une autre collection du même type a été découvert au château de Clisson (44) par Jocelyn Martineau (INRAP) et a été publié dans un Histoire et Images Médiévales (je ne sais plus lequel). Ce sont les deux seules trouvailles françaises de ce type. La thèse de V. Serdon que vous connaissez certainement ne parle pas du tout de cette pratique, sachant qu'elle a vu près de 3000 individus. Ceci dit, si les collections observés n'ont pas été restaurées, il est difficile de dire si certains individus ont été plaqué d'alliage à base de cuivre.

Concernant les usages, de nombreuses hypothèses ont été soulevée, et on n'a pas vraiment réussi à trancher. Les anglais ont le même soucis, sauf que les chercheurs que nous avons réussi à contacter nous disent que les pointes de flèches sont forgées en deux parties qui sont ensuite soudées. Ils pensent que cela pourrait correspondre à une brasure, plus économique que la soudure. Mais, apparemment ils ont aussi des plaquages sur des pointes qui sont d'une pièce et ils tombent dans les mêmes réflexions que nous : Décors ayant un rôle social, technique ? Brasure pour fermer la douille ? Protection contre la corrosion ? Poison (avec les oxydes de cuivre) ? Masquer la brillance du fer (idée anglaise...) ? Boucher les fissures éventuelles du fer ? La présence dans la douille pourrait aider à la fixation sur le bois ?

Bref, ça touche à la technique ou au social. La production de carreaux d'arbalète au XVeme siècle est assez industrielle, on est en pleine Guerre de Cent Ans (à Chevreuse et à Clisson). On sait que les commandes se font par centaines voir par milliers. On imagine pas le forgeron perdre un temps fou à produire des carreaux décorés, surtout pour qu'ils finissent dans la tronche de ceux d'en face. D'ailleurs, je suis assez surpris par ce que les Anglais nous dise. Je ne pensais pas que certains fer de trait pouvaient être fait en deux parties soudées. Si vous avez des exemples, je suis intéressé. Sans remettre en question leur parole, je me permets d'émettre un doute sur cette interprétation. Quoi qu'il en soit, le test présenté ici montre que l'hypothèse que nous avions faite lors de l'étude consistant à faire plonger le fer de trait dans un bronze en fusion semble être valide. Comme le dit Fabrice, je pense qu'il faut maintenant développé un protocole d'étude scientifique. Et apparemment, il sera possible de faire de l'analyse au MEB sur des exemplaires expérimentaux. J'insiste aussi sur le fait que ce n'est pas parce qu'on arrive à le faire comme ça, que c'est comme ça que c'était fait. C'est une hypothèse probable. Les premières réflexions qui me viennent au regard de ces résultats sont les suivantes : Le métal sort noir, sans éclat. Faut-il imaginer une autre étape de décapage dans la chaîne opératoire ? En effet, si on postule que le travail doit être fait rapidement pour produire en série, ajouter une étape complique le travail (plus de temps/homme, etc...). Dans ce cas, on peut se demander si il existe cette étape de mis au propre du plaquage, si elle a une utilité. Si oui, on est probablement plus dans approche esthétique de l'objet. Si non, il faut aller chercher plutôt dans la dimension technique.

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merci pour le complément d'information. d'après ce que tu j'ai cru comprendre en lisant ce que tu as écrit cette pratique, reste, pour le moment très peu décrite dans la littérature sur le sujet. Je vais surement enfoncer des portes ouvertes mais au vu de ce que vous avez pu mettre en évidence, il serait alors bon de revoir des séries déjà étudiées pour essayer de mettre en évidence de possibles traces d'alliages cuivreux. Si la présence était avérée sur un nombre statistiquement important de pièces alors, cela serait un bon indicateur d'un potentiel rôle technique. j'avoue que l'interprétation de la brasure pour unir deux parties de la pointe me laisse assez sceptique surtout quand on voit la vitesse de fabrication d'une pointe de flèche, les armatures servant pour une arbalète n'étant pas très différentes.

Si par contre cette pratique, au vu du plus grand échantillon étudié restait marginale alors envisager un usage moins fonctionnel me semblerait assez logique.... Comme disaient les préhistoriens il y a quelques années, ça serait alors surement rituel... :109:

Mais je pense que vous avez déjà du avoir ce raisonnement.

dans tous les cas, bon courage pour la suite et merci de partager ça avec nous.

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Désolé pour avoir écorché ton nom :oups:

Pas de soucis :rolleyes: .

Pour info, une petite synthèse de notre travail a été publié dans les bulletins du BROMEC (Bulletin of Research on MEtal Conservation) n°29 en août 2009. Par contre, je ne suis pas sûr que ce soit très accessibles en ligne.

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Si cela a un but de conservation, alors comment se comportent les alliages cuivreux en milieu humide? Ils me semble qu'ils se dégradent moins mais j'avoue que les métaux ça na jamais été mon fort...

Les cuivreux s'oxydent comme tous les métaux, mais sensiblement moins vite que les ferreux.

L'une des caractéristiques particulières des oxydes de cuivre (le "vert de gris") c'est qu'ils forment une couche de quelques microns qui est protectrice et relativement étanche à l'oxygène, ralentissant le processus voire le stoppant s'il n'y a pas de phénomène secondaire (abrasif ou chimique) qui entame cette couche protectrice.

Les bronzes (à l'étain) résistent encore mieux que les cuivres "purs", surtout en atmosphère saline ; les autres alliages cuivreux sont soit trop fragiles pour un emploi militaire(laitons), soit inconnus au M-A (bronzes au phosphore ou au cobalt, maillechort).

Les propriétés toxiques du vert de gris étaient évidemment connues, un usage d'empoisonnement des armatures cuivrées (plutôt que bronzées effectivement) n'est sûrement pas à exclure, même s'il n'est qu'accessoire.

Le bronzage n'est pas un traitement électrochimique, c'est un traitement chimique pur, en l'occurrence une oxydation contrôlée par couches successives, avec accélération éventuelle par élévation de la température des bains de sels oxydants.

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Bon je me lance sur une hypothèse un peu farfelue, teintée d'intentionalité : la couche de bronze sur la pointe aurait pu servir de lubrifiant pour augmenter la pénétration lors de l'impact dans une armure. Un peu dans l'idée des balles de fusil recouvertes de téflon... En effet, le bronze est un métal autolubrifiant, il est d'ailleurs toujours utilisé comme matériaux de frottement entre des axes en acier.

Une question : est-on sûr qu'il s'agisse de bronze ou d'un alliage cuivreux, et pas de cuivre tout simplement ?

Le dépot de bronze par immersion dans du bronze fondu me semble assez fastidieux.

S'il s'agit de cuivre seulement, je crois qu'il existe un procédé de dépôt assez simple, par oxydo réduction : il consiste à plonger le métal ferreux décapé dans une solution aqueuse de sulfate de cuivre II. Il se dépose alors une mince couche de cuivre sur le fer (de mémoire assez tenace, il fallait la poncer pour l'enlever) :

Fe + Cu2+ --> Cu + Fe2+

le sulfate de cuivre s'obtient en faisant réagir de l'acide sulfurique (vitriol) sur du vert de gris.

Est-ce que le sulfate de cuivre était connu et utilisé au moyen âge ? ...

Edited by Fabien
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Bonjour à tous,

je suis Nicolas Girault (pas D, Fabrice), je fais parti de l'équipe qui a étudié cette collection. Mes deux autres camarades sont Sylvia Païn du service archéologique des Yvelines, restauratrice, et Aurore Doridot, doctorante à l'université de Paris 1, spécialiste des objets à base cuivre au Moyen Age qui a gérer en grande partie la dimension analytique en laboratoire.

Pour corriger et donner quelques détails : Ces fers de trait, dont quelques pointes de flèches, ont été trouvées essentiellement en position secondaire (pas là où on les attend) dans la base d'une tour associés à du matériel du XVeme siècle (et pas dans les douves, qui au passage n'ont jamais été fouillées) et dans un niveau remanié et réoccupé au XVIeme siècle par les troupes de la Ligue. Ils étaient tellement corrodés que ces carreaux ne présentaient aucune trace d'alliage à base de cuivre (bronze et laiton) au moment de leur découverte. Pour répondre à la question sur la corrosion, bien que le fer "parte" en premier, l'alliage cuivreux fini aussi par se corroder quand le fer est totalement minéralisé. Dans certains cas, des vestiges métalliques ont été découverts sous les produits de corrosions du fer qui ont migré en surface des carreaux. La plupart du temps, avant restauration, c'est la présence très discrète de produits de corrosions verdâtres qui a permis de détecter ce plaquage. Souvent, il ne reste plus du tout de métal conservé, on ne retrouve que ces produits verts intriqués dans la corrosion du fer. Il a donc était difficile d'identifier l'emprise exacte des plaquages sur les carreaux. Aucun exemplaire ne présente de trace de plaquage sur la pointe, cela ne veut pas dire que cela n'a pas été pratiqué. Les traces les plus proches de l'extrémité se situent au démarrage de la pointe après l'inflexion. On n'a réussi à caractériser ce plaquage uniquement en réalisant des coupes dans deux échantillons. Avec ces derniers, on a fait une cartographie des éléments chimiques grâce à un microscope électronique à balayage couplé à un EDS (permet la mesure quantitative des éléments chimiques). Ce fut long, mais on a réussi a montré que le métal devait se répartir au moins sur la totalité de la surface de la douille (intérieur et extérieur) et jusqu'à la base de la pointe. On ne préfère pas utiliser le terme de bronzage pour désigner cette pratique, le bronzage étant plutôt un traitement electro-chimique alors que là c'est clairement (même si je n'ai pas détaillé) thermo-chimique. Dernière remarque, une autre collection du même type a été découvert au château de Clisson (44) par Jocelyn Martineau (INRAP) et a été publié dans un Histoire et Images Médiévales (je ne sais plus lequel). Ce sont les deux seules trouvailles françaises de ce type. La thèse de V. Serdon que vous connaissez certainement ne parle pas du tout de cette pratique, sachant qu'elle a vu près de 3000 individus. Ceci dit, si les collections observés n'ont pas été restaurées, il est difficile de dire si certains individus ont été plaqué d'alliage à base de cuivre.

Concernant les usages, de nombreuses hypothèses ont été soulevée, et on n'a pas vraiment réussi à trancher. Les anglais ont le même soucis, sauf que les chercheurs que nous avons réussi à contacter nous disent que les pointes de flèches sont forgées en deux parties qui sont ensuite soudées. Ils pensent que cela pourrait correspondre à une brasure, plus économique que la soudure. Mais, apparemment ils ont aussi des plaquages sur des pointes qui sont d'une pièce et ils tombent dans les mêmes réflexions que nous : Décors ayant un rôle social, technique ? Brasure pour fermer la douille ? Protection contre la corrosion ? Poison (avec les oxydes de cuivre) ? Masquer la brillance du fer (idée anglaise...) ? Boucher les fissures éventuelles du fer ? La présence dans la douille pourrait aider à la fixation sur le bois ?

Bref, ça touche à la technique ou au social. La production de carreaux d'arbalète au XVeme siècle est assez industrielle, on est en pleine Guerre de Cent Ans (à Chevreuse et à Clisson). On sait que les commandes se font par centaines voir par milliers. On imagine pas le forgeron perdre un temps fou à produire des carreaux décorés, surtout pour qu'ils finissent dans la tronche de ceux d'en face. D'ailleurs, je suis assez surpris par ce que les Anglais nous dise. Je ne pensais pas que certains fer de trait pouvaient être fait en deux parties soudées. Si vous avez des exemples, je suis intéressé. Sans remettre en question leur parole, je me permets d'émettre un doute sur cette interprétation. Quoi qu'il en soit, le test présenté ici montre que l'hypothèse que nous avions faite lors de l'étude consistant à faire plonger le fer de trait dans un bronze en fusion semble être valide. Comme le dit Fabrice, je pense qu'il faut maintenant développé un protocole d'étude scientifique. Et apparemment, il sera possible de faire de l'analyse au MEB sur des exemplaires expérimentaux. J'insiste aussi sur le fait que ce n'est pas parce qu'on arrive à le faire comme ça, que c'est comme ça que c'était fait. C'est une hypothèse probable. Les premières réflexions qui me viennent au regard de ces résultats sont les suivantes : Le métal sort noir, sans éclat. Faut-il imaginer une autre étape de décapage dans la chaîne opératoire ? En effet, si on postule que le travail doit être fait rapidement pour produire en série, ajouter une étape complique le travail (plus de temps/homme, etc...). Dans ce cas, on peut se demander si il existe cette étape de mis au propre du plaquage, si elle a une utilité. Si oui, on est probablement plus dans approche esthétique de l'objet. Si non, il faut aller chercher plutôt dans la dimension technique.

Fabrice m'avait parlé de cette question d'armature et de cuivre dans les dépôts de corrosion, j'ai une hypothèse assez hardie sur le sujet et je l'ai testée partiellement :

si ces oxydes de cuivre provenaient de la colle ???? Je sais que les armatures n'étaient par forcément collées sur la hampe mais plutôt forcée jusqu'à blocage, mais un truc me titille :

les flèches de la Mary Rose (naufrage en 1545) portent encore des traces de colle verte que les chercheurs interprètent comme une colle naturelle (os ou peau) additionnée de sulfate de cuivre dont ils ne voient pas la raison... Pour moi il s'agit d'un anti sceptique avant la lettre afin de permettre la conservation des collages dans de bonnes conditions même quand il fait humide. J'ai fait quelques tests de colle avec ou sans sulfate de cuivre que j'ai laissé à lair libre en les ensemençant au besoin avec des eaux fortements chargées en bactéries ... Après quelques jours, la colle sans sulfate de cuivre est bouffée tandis que celle avec du CuSO4 se conserve sans problème .... Je comptais porter mes tests un peu plus loin mais si cela t'interesse j'ai les relevé de mes observations par date avec photos de l'évolution des colles.

Concernant la fabrication des pointes en 2 parties soudées, je pense qu'il s'agit essentiellement d'une technique du 15e s afin depouvoir s'adatper à l'évolution des armures (qui commencent à être aciérée à cette époque) : on fait une douille en acier doux sur laquelle est soudée une pièce e,en acier (donc plus solide et plus pénétrante). Pour ce que j'en ai lu il s'agit surtout de pointes à ailerons et barbillon type 16 (classification du museum of London)

mais je pense aussi que de toute façon ils visaient la production en série donc pas de fioriture si soudure il y a c'est une soudure à la forge ... as-tu déjà interrogé Hector Cole sur le sujet ??? C'est un forgeron british qui en connaît un solide morceau sur les armatures et leur fabrication (je dois avoir son adresse mail)

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Le bronzage n'est pas un traitement électrochimique, c'est un traitement chimique pur, en l'occurrence une oxydation contrôlée par couches successives, avec accélération éventuelle par élévation de la température des bains de sels oxydants.

Merci pour la correction

la couche de bronze sur la pointe aurait pu servir de lubrifiant pour augmenter la pénétration lors de l'impact dans une armure. Un peu dans l'idée des balles de fusil recouvertes de téflon...

Les travaux de JMC montrent bien la puissance que développent les arbalètes. Est-ce bien nécessaire de vouloir améliorer la pénétration des viretons ? Ceci dit, ce n'est pas une hypothèse à exclure. On peut d'ailleurs imaginer que ce plaquage de bronze regroupe un faisceau d'intérêts (collage, brasure des la douille, pénétration meilleure, etc...) qui fait de ces traits polymétalliques des munitions de meilleurs qualités. Je pense que c'est une bonne démarche que d'avoir ça à l'esprit et de se poser la question en ces termes.

est-on sûr qu'il s'agisse de bronze ou d'un alliage cuivreux, et pas de cuivre tout simplement ?

Oui c'est sûr que c'est un alliage. Les analyses au MEB ont montré la présence d'étain et/ou de zinc en fonction des cas, intriqué avec le cuivre. Ce ne peut donc pas être obtenu par dépôt électrochimique.

si ces oxydes de cuivre provenaient de la colle ????

On y a pensé un moment au début. Sauf qu'on s'est aperçu que certains fers de trait présentaient encore des traces de métal non corrodés. En outre, la cartographie au MEB a bien montré une répartition du métal cuivreux sur la totalité de la surface du fer, dans la douille, sur le bord de la douille, sur l'extérieur de la douille et à la base de la pointe. Par contre, l'objectif pourrait être le même : protéger la colle et le bois d'une dégradation. Au passage, si les anglais ne voient pas l'intérêt du sulfate de cuivre dans la colle, c'est un peu dommage. En effet, les processus de préservation des matériaux organiques par les sels métalliques est un phénomène connu en archéologie (boucle de ceinture, passe-lacet, etc...).

concernant la fabrication des pointes en 2 parties soudées, je pense qu'il s'agit essentiellement d'une technique du 15e s afin de pouvoir s'adatper à l'évolution des armures (qui commencent à être aciérée à cette époque) : on fait une douille en acier doux sur laquelle est soudée une pièce e,en acier (donc plus solide et plus pénétrante). Pour ce que j'en ai lu il s'agit surtout de pointes à ailerons et barbillon type 16 (classification du museum of London)

As-tu une publication à me conseiller à ce sujet ? les chercheurs anglais qui nous ont contacter pensent que la brasure est plus rapide à faire que la soudure à la forge.

Je reviens juste sur le contexte de l'étude. Je ne suis pas spécialiste des armes de trait ni archer ou versé dans l'art de l'arbalète. J'ai un peu bosser sur l'armure médiévale, et sur le mobilier en fer des XIIIeme-XVeme siècle. La coeur de ma recherche est d'ailleurs plutôt la métallurgie du fer en bas-fourneau. Ceci dit, en découvrant cette collection, je me suis dit qu'on ne pouvait pas passer à côté. Cela explique pourquoi on se tourne aussi vers des spécialistes et des passionnés comme vous. Et je tiens particulièrement à vous remercier de nous aider à faire avancer la question.

Edited by Vuillem
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Merci pour la correction

Les travaux de JMC montrent bien la puissance que développent les arbalètes. Est-ce bien nécessaire de vouloir améliorer la pénétration des viretons ? Ceci dit, ce n'est pas une hypothèse à exclure. On peut d'ailleurs imaginer que ce plaquage de bronze regroupe un faisceau d'intérêts (collage, brasure des la douille, pénétration meilleure, etc...) qui fait de ces traits polymétalliques des munitions de meilleurs qualités. Je pense que c'est une bonne démarche que d'avoir ça à l'esprit et de se poser la question en ces termes.

Oui c'est sûr que c'est un alliage. Les analyses au MEB ont montré la présence d'étain et/ou de zinc en fonction des cas, intriqué avec le cuivre. Ce ne peut donc pas être obtenu par dépôt électrochimique.

On y a pensé un moment au début. Sauf qu'on s'est aperçu que certains fers de trait présentaient encore des traces de métal non corrodés. En outre, la cartographie au MEB a bien montré une répartition du métal cuivreux sur la totalité de la surface du fer, dans la douille, sur le bord de la douille, sur l'extérieur de la douille et à la base de la pointe. Par contre, l'objectif pourrait être le même : protéger la colle et le bois d'une dégradation. Au passage, si les anglais ne voient pas l'intérêt du sulfate de cuivre dans la colle, c'est un peu dommage. En effet, les processus de préservation des matériaux organiques par les sels métalliques est un phénomène connu en archéologie (boucle de ceinture, passe-lacet, etc...).

As-tu une publication à me conseiller à ce sujet ? les chercheurs anglais qui nous ont contacter pensent que la brasure est plus rapide à faire que la soudure à la forge.

Je reviens juste sur le contexte de l'étude. Je ne suis pas spécialiste des armes de trait ni archer ou versé dans l'art de l'arbalète. J'ai un peu bosser sur l'armure médiévale, et sur le mobilier en fer des XIIIeme-XVeme siècle. La coeur de ma recherche est d'ailleurs plutôt la métallurgie du fer en bas-fourneau. Ceci dit, en découvrant cette collection, je me suis dit qu'on ne pouvait pas passer à côté. Cela explique pourquoi on se tourne aussi vers des spécialistes et des passionnés comme vous. Et je tiens particulièrement à vous remercier de nous aider à faire avancer la question.

pour contacter hector cole : hectorcole@lineone.net

les infos sur les pointes et la résistance des armures au 15e que j'ai, proviennent du livre "the great warbow" the M Strickland. je penses que Pierre en avait parlé en son temps sur WA. Le bouquin est une mine d'info sur l'archerie médiévale anglaise. A mon avis la biblio devrait pouvoir t'aider

tu peux aussi essayer de contacter la SAA (society of archers antiquaries)ils ont un site internet et un forum de discussion, mais ke crosi que l'accés est limité pour les non membres

si tu me files ton adresse

je peux t'adresser des copies de la typo des pointes de flèches médiévales du museum of London (des années 30 mais encore utilisée) ainsi que la typo alternative de Jessop (le tout en english... of course ....)

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j'ai repris les essais cet après midi , sur un lot de 8 pointes.

j'ai rencontré pas mal de problèmes avec la fusion du bronze(de la récup)surement à cause de la chauffe inadaptée , du froid extérieur,des pointes trempées dans le bain sans les portées au rouge .

pas un succès pour le moment.

les douilles non chauffées avant la trempe ont une tendance à refroidir le bronze trop rapidement.

le décapage se fera à la lumière du jour .

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Guest arc à hic

D'après ce que j'ai pu constater le week end dernier, ta technique de traitement des armatures est suffisament rapide pour qu'un artisan maitrisant la fusion du bronze et la chauffe des armatures puisse traiter plus de 100armatures à la journée.

Si ta forge etait un peu plus ventilée ou ventilée sur une plus grande surface, que ton creuset était un peu plus large et profond, je pense que ce seraient même des centaines de douilles a la journée... Très impressionnant la vitesse à laquelle les armatures passent au blanc lors du traitement, elles pourraient être trempées a l'eau dans le même mouvement...

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